Afin d’accompagner les éleveurs dans leur recherche d’autonomie, les organismes partenaires du projet ARPEEGE ont travaillé avec des fermes « pilotes ». Une fois leur niveau d’autonomie évalué, des leviers ont été mis en place pour l’améliorer. Zoom sur une solution testée par le GAEC de l’Uvry, en Meurthe-et-Moselle.
Le GAEC de l’Uvry, à Goviller (54), est un élevage laitier qui compte 185 vaches laitières sur une surface de 298ha en agriculture biologique, suivi par Optival. La main d’œuvre représente 4,5 ETP, dont 3 associés. L’objectif des associés du GAEC de l’Uvry n’est pas d’être autonome à 100 % au niveau de l’exploitation. « Nous sommes sur une structure spécialisée lait et les surfaces disponibles ne permettent pas d’être totalement autonome. Il faudrait 100 ha de SAU supplémentaires pour être vraiment indépendants », précise Pierre Vallance, l’un des associés. Les éleveurs misent sur une autonomie massique à l’échelle de l’exploitation pour produire leurs fourrages. En revanche, la couverture énergétique et protéique du troupeau est raisonnée à l’échelle locale. « Nous essayons de trouver des ressources locales. Nous ne voulons pas dépendre des cours des marchés mondiaux et nous souhaitons limiter au maximum les intermédiaires » ajoute l’exploitant.
73 % d’autonomie protéique
Avant le passage en agriculture biologique en début d’année 2022, l’autonomie protéique était de 43 % à l’échelle de l’exploitation et de 100 % à l’échelle de la région Grand-Est, étant donné l’utilisation dans la ration de co-produits humides et secs provenant des territoires voisins. Aujourd’hui, il n’est plus possible d’utiliser ces ressources en bio. Des leviers ont donc été mis en place pour augmenter l’autonomie protéique de l’exploitation qui atteint désormais 73 % : implantation de méteils, de luzerne et de soja. Néanmoins, ce gain sur la protéine a eu pour effet d’augmenter la dépendance énergétique de l’exploitation, notamment due à la luzerne. Pour combler ces déficits en énergie et protéine, les éleveurs sollicitent une coopérative locale pour récupérer du maïs grain, des graines de soja et de pois produits localement.
Pour corriger la ration à l’auge constituée d’ensilage de maïs et de luzerne, les graines de soja et pois toastées sont distribuées au robot. L’installation dispose de deux cellules de stockage, une avec un mélange 50% soja et 50% pois et l’autre avec uniquement des graines de pois. « Nous n’avons pas pris le risque de stocker le soja en pur à cause de sa teneur en matière grasse. Ce choix a été fait pour assurer l’écoulement dans les vis et limiter le risque de colmatage dans la cellule » explique Pierre Vallance.
Des graines de soja et pois toastées au robot
Les associés ont choisi de les toaster afin d’éliminer les facteurs antinutritionnels, de tanner la protéine et d’améliorer la conservation. Ils assurent ainsi une meilleure valorisation des graines. Le coût de ce procédé est de 56€/T. « On arrive facilement à conserver les graines de soja toastées et broyées quatre à six semaines sans problème de rancissement. Les graines sont aussi plus appétentes : nous n’avons presque plus de vaches à pousser au robot et nous avons gagné 0,2 traite/VL/jour au niveau de la fréquentation » ajoute l’éleveur. Les meilleures vaches reçoivent ainsi jusqu’à 2,3Kg de soja et 5-6 Kg de pois.
Des performances laitières au rendez-vous
Cet hiver, avec la nouvelle ration, la production laitière a été de 26,5 Kg de lait/VL/jour, soit un niveau de production brut de 8500 kg de lait. Le taux butyreux s’est maintenu par rapport aux résultats habituels du troupeau, autour de 40gTB/Kg de lait. En revanche, l’utilisation de graines de soja a provoqué une baisse du taux protéique : il a chuté de presque trois points et peine à atteindre 30gTP/Kg de lait. Cette perte n’est pas sans conséquence sur le prix du lait mais la marge sur coût alimentaire reste correcte : 7,27€/VL/jour.