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GDS de Meurthe-et-Moselle : comment se prémunir face aux maladies émergentes

Hervé Dartois, nouveau président du Gds, Corinne Cierco, directrice, Apolline Bleuse, nutritionniste et Brendan Bourdet, vétérinaire praticien dans le Doubs. Photo : GDS 54.
Hervé Dartois, nouveau président du Gds, Corinne Cierco, directrice, Apolline Bleuse, nutritionniste et Brendan Bourdet, vétérinaire praticien dans le Doubs. Photo : GDS 54.

Le Groupement de défense sanitaire de Meurthe-et-Moselle organisait, le 8 avril, une réunion d’information sur l’arrivée des maladies émergentes sur le territoire et sur les outils à disposition pour leur faire face et tenter de minimiser l’impact sanitaire sur les cheptels. Deux experts ont pu échanger avec la salle : le docteur Brendan Bourdet, vétérinaire praticien dans le Doubs et Apolline Bleuse, nutritionniste.

La Meurthe-et-Moselle se trouve à la confluence de l’émergence de trois pathologies : Fco 8, Fco 3 (fièvre catarrhale ovine ) et Mhe (maladie hémorragique épizootique). Ces maladies émergentes connaissent une dynamique et une réalité beaucoup plus importante liée à la globalisation des échanges et à la modification du climat. Le président du Groupement de Défense Sanitaire, Hervé Dartoy, tenait ainsi sa première réunion publique avec l’objectif d’informer les éleveurs sur la propagation de ces sérotypes et de préserver au mieux la santé de nos troupeaux.

Forte fièvre symptôme majeur

Le docteur Brendan Bourdet a expliqué les maladies vectorielles et leurs impacts. Ce sont des pathologies transmises par des moucherons femelles qui se nourrissent de sang (culicoïdes). Leur atteinte est variable d’un élevage à l’autre. Il a décrit les signes cliniques correspondant ainsi que l’état des lieux épidémiologique dans les départements qui ont été touchés à l’automne dernier. L’activité vectorielle a déjà repris avec plusieurs semaines d’avance, comme en témoignait d’ailleurs la douceur estivale de ce 8 avril. Même si la météo s’est infléchie dans les jours qui ont suivi.

Le symptôme majeur est une forte fièvre, qu’il convient de surveiller (mais aussi une perte d’appétit, de l'abattement, des avortements, etc.). D’autres symptômes évocateurs : démarche raide, œdèmes, croûtes au niveau du mufle, jetage nasal, etc. «Pour la Mhe, un ulcère au niveau du bourgeon des incisives est caractéristique de la maladie» précise-t-il. La surveillance quotidienne des animaux est alors fondamentale pour repérer précocement ses animaux atteints.

S’il existe un vaccin contre la Fco 8 dont l’utilisation est recommandée, ce n’est pas le cas pour la Fco 3 et la Mhe. En termes de précaution et de biosécurité, la gestion des points d’abreuvement a été jugée fondamentale. En cas de passage viral sur le troupeau, l’accès à beaucoup d’eau est indispensable pour se rétablir de la fièvre. «Il ne faut pas hésiter à ajouter un bac temporairement dans la stabulation ou en pâture» conseille le docteur Bourdet. Autre point essentiel, faire la chasse aux zones humides non naturelles où l’eau résiduelle stagne comme dans les flaques d’eau en sortie de parc, par exemple, ou dans les pneus des silos, etc. pour éviter la pullulation des culicoïdes. Autant que possible, éviter d’acheter des bovins à l’extérieur de la région, au risque d’accélérer l’arrivée de la maladie sur le territoire lorrain.

Equilibre environnement défenses

En cas de maladie, les injections d’antipyrétique et anti-inflammatoire peuvent aider à faire diminuer la fièvre et la douleur, et donc les impacts de la maladie. Cela a montré son intérêt dans les élevages foyers du sud-ouest (à gérer avec son vétérinaire).

Concernant l’application systématique de produits antiparasitaires dans un but de protection contre les vecteurs, l’avis du docteur Bourdet est plutôt mitigé. Pour une couverture efficace, l’application doit être répétée environ toutes les trois semaines (variable en fonction des précipitations). A ce rythme, on peut ainsi fortement douter de la balance coût-bénéfice pour l’élevage. En contrepartie, l’impact environnemental et la création d’accoutumance au produit sont bien réels, avec l’apparition de culicoïdes résistants aux antiparasitaires. En revanche, désinsectiser précocement et de façon répétée est fondamental pour limiter la propagation du virus.

Apolline Bleuse a enchaîné sur l’importance de garder un équilibre entre l’environnement et les défenses de l’animal. Elle a établi le parallèle entre l’épisode de Covid pour lequel le virus pouvait impacter très différemment chaque personne, en fonction de son état de santé. Ce parallèle a été confirmé par les études menées par la plateforme d’épidémio-surveillance Esa, qui démontre une réelle variabilité de l’impact des pathologies entre les cheptels et les individus en fonction de l’état de santé initial du troupeau.

Défi immunitaire et stress

La nutritionniste a rappelé l’importance d’une alimentation équilibrée et appétante, de l’abreuvement en quantité et en qualité également, et de la complémentation en minéraux, vitamines et oligo-éléments, en particulier, le sélénium. Ce dernier est en effet indispensable pour l’obtention d’un bon niveau d’immunité. Apolline Bleuse a aussi pris l’exemple du calcium qui joue un rôle direct dans le mécanisme de l’immunité (fonctionnement des macrophages) ; il convient donc de prévenir au maximum l’hypocalcémie par la gestion de la Baca en fin de gestation, une ration aux taries sur-mesure ou encore une complémentation systématique en calcium dès la troisième lactation.

Le défi immunitaire est d’autant plus grand que les animaux sont soumis au stress, qu’il soit thermique, oxydatif, social, transition… «celui-ci agit comme un lessivage des minéraux oligoéléments vitamines, un point auquel on ne pense pas forcément en première intention».

Les échanges après la présentation ont été riches entre les intervenants et l’assemblée afin de répondre aux interrogations de chacun. Un webinaire en ligne a été proposé par le Gds sur le même sujet le 26 avril. La vidéo de ces deux réunions sont disponibles sur le site internet du Gds en rediffusion.