Vous êtes ici

Campagne herbe 2024 : des excès d’eau depuis l’automne

Sur des parcelles gorgées d’eau et peu portantes, le pâturage a pu  entrainer des phénomènes de piétinement important. Photo : A.Boulanger / CDA 54
Sur des parcelles gorgées d’eau et peu portantes, le pâturage a pu entrainer des phénomènes de piétinement important. Photo : A.Boulanger / CDA 54

Avec des excès d’eau importants et des fenêtres climatiques réduites, les éleveurs ont peiné à réaliser les premières coupes et à faire pâturer les animaux ce printemps.

Depuis l’automne 2023, les précipitations n’épargnent pas notre région, et cela se ressent sur la campagne herbagère 2024. «Dès la sortie d’hiver, les éleveurs ont dû gérer des excès d’eau, explique Amélie Boulanger, pour le groupe Herbe et fourrages Grand Est. Il n’a pas été possible de déprimer. Certaines parcelles n’avaient déjà pas pu être récoltées à l’automne et les éleveurs se sont retrouvés avec une végétation en excès de manière précoce, sans possibilité d’accès au parcelles».

En effet, les nombreuses précipitations ont dégradé les conditions de portance du sol. La gestion du pâturage a été délicate ces derniers mois. «Certains éleveurs ont rentré et sorti leur troupeau plusieurs fois, d’autres ont pratiqué du pâturage tournant, mais certaines parcelles ont beaucoup souffert de piétinement. D’autres encore, pour limiter ce phénomène, ont décidé de tourner très rapidement sur les paddocks, déplaçant les animaux deux fois par jour. Toutefois, cela a entrainé beaucoup de refus et de gâchis», détaille Amélie Boulanger.

Pas de solution miracle face à ces excès d’eau, «les éleveurs ont géré comme ils ont pu», explique la conseillère. En fauche également, les conditions climatiques ont compliqué les chantiers. «Si les premières coupes les plus précoces ont eu lieu entre le 5 et le 9 avril, les dernières se sont déroulées vers le 24  mai», indique Lionel Vivenot, conseiller en élevage laitier à l’Ulm. «Le gros des chantiers s’est déroulé autour du week-end de l’Ascension», explique Amélie Boulanger. Les fenêtres météo ont été très resserrées, «nous avons conseillé de faire du forcing dès qu’un créneau apparaissait», ajoute-t-elle. L’objectif : réaliser le maximum de fauches précoces, pour espérer des repousses de qualité. Toutefois, cette stratégie sur des parcelles limites au niveau de la portance a pu créer des tassements.

Ressortir les faneuses

Tassements sur parcelles fauchées, piétinement sur parcelles pâturées, «cela risque de laisser des traces dans les années à venir, ou si l’été est sec», estime Lionel Vivenot. Toutefois, l’alternative, de laisser l’herbe sur pied en attendant une amélioration, n’était pas forcément préférable. «Sur les parcelles qui n’ont pas pu être fauchées, détaille Amélie Boulanger, les éleveurs se retrouvent avec de l’herbe à un stade très avancé, mais une végétation toujours très verte et humide car la jeune végétation repousse en dessous. Ainsi, cela entraînera des difficultés de séchage».

Afin d’améliorer le taux de matière sèche des fourrages récoltés en ensilage ou enrubannage, Lionel Vivenot conseille «de ressortir les faneuses. Cette année, nous insistons sur la nécessité de faucher à plat puis de faner, avant d’andainer. En effet, l’année dernière, beaucoup de silos ont coulé. Grâce au fanage, c’est moins le cas cette année, malgré les conditions climatiques défavorables. Des fourrages trop humides à l’entrée au silo peuvent poser des problèmes de spores butyriques, mais également des pertes de jus, de sucre et d’azote. On peut rapidement perdre trois points de MAT avec un silo qui coule».

Dorénavant, ce sont les chantiers de foin qui «devraient bientôt démarrer, en même temps que certains vont pouvoir réaliser les deuxièmes coupes, c’est très hétérogène», indiquait Lionel Vivenot, le 4  juin. L’hétérogénéité est marquée également sur la qualité, entre des premières coupes effectuées début avril et d’autre mi, voire fin mai. «Dans tous les cas, les ensilages seront globalement moins bons que l’année dernière. Pour faire du lait, cela risque d’être plus compliqué», estime-t-il. Enfin, dans certains secteurs, particulièrement touchés par les inondations, «des parcelles entières sont perdues, déplore Amélie Boulanger. Les éleveurs attendent que cela ressuie pour exporter la biomasse et espérer de bonnes repousses».

Pour pallier le manque d’herbe, certains ont décidé de réaffecter des surfaces de Cive destinées à la méthanisation vers l’élevage. «Des parcelles de céréales très sales pourront également être fauchées en immature et ensilées pour servir de fourrages à des animaux à plus faibles besoins», estime la conseillère, qui entrevoit également la pistes des dérobées fourragères, si l’été est clément.