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Rapport d'orientation de la Fdsea : l’eau à la source d’un avenir agricole

Florian Segault (président JA) ; Jérémy Jenneson (président FDSEA) ; Françoise Souliman (préfet) et Arnaud Rousseau (président FNSEA). Photo : JL.Masson
Florian Segault (président JA) ; Jérémy Jenneson (président FDSEA) ; Françoise Souliman (préfet) et Arnaud Rousseau (président FNSEA). Photo : JL.Masson

Face au changement climatique, l’accès à l’eau devient crucial pour l’agriculture. LA FDSEA ouvre le débat, en préconisant un partage de la ressource multi-usage, multi-ressources et multifonctions». Elle veut lever les «postures rétrogrades» sur l’irrigation et «faire bouger les dogmes». Arguments.

Bien avant que les évènements ne fassent basculer le monde agricole dans la crise de ces derniers mois, la FDSEA avait lancé une piste de réflexion autour de l’exercice de l’acte de production agricole demain. Le changement climatique place la question des stockages et des usages de l’eau au cœur des stratégies du futur.

Dix semaines de couverture au printemps

Ce thème a donné matière à la rédaction du rapport d’orientation du syndicat, lequel est persuadé qu’il conditionne les chances de réussite de la Lorraine agricole dans les années à venir. Jérémy Jenneson a lui-même présenté ce document. Il entre en matière par un petit calcul. Sur les 5.200 km² de la surface du département, il tombe bon an, mal an, 3 milliards de m3 d’eau annuels. Si chacun des 750.000 Meurthe-et-mosellans consomme 55 m3, cela donne un total de 40 millions de m3, soit 1,3 % de la ressource. Le président lance alors l’idée d’un stockage de seulement 3 % du volume total (90 millions de m3). Si le cinquième de la SAU était irrigué -56.000 ha-, à raison de 1.600 m3 par ha, cela permettrait dix semaines de couverture au printemps. «Qui peut croire que l’on puisse perturber le département avec ce modeste prélèvement ?» questionne Jérémy Jenneson.

L’urgence majeure est de renforcer la résilience des exploitations de polyculture-élevage en zone intermédiaire. Sur un territoire où l’irrigation est historiquement absente, la FDSEA a audité les acteurs locaux de l’eau pour établir son positionnement. Le climat change, la certitude scientifique est confirmée ; il pleut toujours autant, mais au mauvais moment ; il apparaît plus de stress hydrique et la totalité de la biodiversité est impactée. Face au constat, le syndicalisme souhaite dépasser les idées reçues. Celles qui prônent la décroissance, ou qui réserveraient l’irrigation au seul maïs alsacien à haute valeur ajoutée. Sans compter la réglementation qui bride les projets.

L’irrigation plus taboue

Au contraire, Jérémy Jenneson propose de «valoriser des ressources dans les territoires» : la pluviométrie hivernale et le réseau hydrologique des têtes de bassins ; les bassins miniers ; les nappes alluviales ; les étangs et canaux gérés par Voies Navigables de France (VNF). 2 milliards de m3 annuels seraient actuellement perdus par VNF. Développer l’irrigation ne semble donc pas hors de portée, à condition d’utiliser l’existant, pour baisser les coûts. « Ce projet Eau, l’agriculture ne le construira pas seule, affirme Jérémy Jenneson. Il sera multi-usage, multi-ressources et multifonctions».

La FDSEA ne « promet pas le grand soir, ni les 100 qx. Mais simplement la performance. Le mot irrigation ne doit plus rester tabou en Lorraine». Les enjeux sont de « sauver les têtes de rotation, sécuriser un système de polyculture-élevage résilient, une agriculture grande cause sur notre territoire et un droit à l’accès à l’eau ».

Face à ce changement de paradigme, les références manquent. La FDSEA appelle de ses vœux une étude experte pour un modèle d’irrigation en Lorraine. L’expérimentation passerait par « des démonstrateurs, en utilisant le droit de dérogation des préfets aux normes réglementaires ». La réforme des règles ERC (Eviter, Réduire, Compenser) est souhaitée, notamment pour redéfinir le «C» afin d’y intégrer les nouvelles externalités positives de l’agriculture. Jérémy Jenneson est particulièrement attaché à la rémunération de ces services annexes rendus par les agriculteurs, souvent au bénéfice de l’environnement, et mal valorisés jusqu’à présent.

Cette réflexion autour des usages de l’eau est présentée comme «une profession de foi » qui sera portée par la FDSEA et les JA, lors de la campagne pour les élections Chambre. « Il faut sortir la réglementation d’une posture rétrograde et bouger les dogmes », conclut Jérémy Jenneson.