Agricultrice, formatrice pendant quinze ans, Laure Génin est aujourd’hui impliquée dans la formation en tant qu’élue à la Chambre d’agriculture 54. Elle partage sa vision de la formation, initiale et continue.
« Mes parents étaient agriculteurs mais je n’étais pas partie pour faire une carrière agricole », confie Laure Génin, installée avec son mari, Jean-Luc, et désormais sa fille, Valentine, à Barisey-au-Plain (54).
Après une scolarité compliquée, « les enfants d’agriculteurs étaient mal vus à l’époque », elle obtient un bac général. Elle poursuit par un BTS Acse (Analyse, Conduite et Stratégie de l’Entreprise Agricole), « à Bar-le-Duc, à cette période, nous ne pouvions pas choisir notre établissement ». Diplôme en poche, en 1991, elle travaille deux mois en centre de gestion puis un an et demi au GDS de Meurthe-et-Moselle, avant de réaliser son parcours à l’installation. « J’ai réalisé mon stage 6 mois, je venais d’accoucher de notre première fille ». Elle s’installe officiellement en 1995 avec Jean-Luc.
En 1996, alors enceinte de leur deuxième fille, Laure Génin est contrainte de se mettre en retrait de la ferme. « J’ai eu connaissance qu’une place de prof de comptabilité était libre à l’Alpa. Je me suis dit que c’était l’occasion, moi qui avais toujours voulu être prof ».
Elle y restera dix ans. « Je l’ai toujours fait par passion et non par besoin. Aussi pour défendre l’image de l’agriculture. C’est un beau métier, mais mal vu ». Elle enseigne, deux jours par semaine, à un public d’adultes, la plupart en reconversion dans l’agriculture. « J’ai côtoyé des publics très variés ». En 2003, son poste de vacataire à l’Alpa prend fin. Elle enseigne alors la zootechnie pendant un an au CFA de Toul, à des niveaux Bepa, « avant de revenir à l’Alpa ».
En 2008, Jean-Luc a un grave accident. « Je me suis dit qu’il était temps que je me recentre sur la ferme ». D’autant qu’une certaine lassitude commençait à s’installer. « J’avais des ados à la maison et je retrouvais des ados en cours, je ne voulais pas devenir une prof aigrie ».
À chacun son parcours
En 2018, Laure Génin fait le choix de s’engager à la Chambre d’agriculture 54. L’équipe est élue début 2019. Elle prend en charge alors le dossier formation. « En tant qu’ancienne formatrice, j’ai conscience de l’importance de la formation ». Elle est engagée au sein de Form’agir, le service formation des Chambres d’agriculture de Lorraine, et siège aux conseils d’administration du lycée agricole de Pixérécourt, de l’Alpa et de Vivéa Lorraine. Elle est également impliquée dans le CREA, le Conseil Régional de l’enseignement agricole. Aujourd’hui son engagement dans la formation prend une autre forme.
De son expérience de la formation et de son métier d’agricultrice, Laure Génin retire plusieurs enseignements. « Aujourd’hui, pour s’installer un bac pro suffit. Il faudrait au moins le niveau BTS. L’administratif est de plus en plus complexe. Il faut être un bon gestionnaire pour réussir en agriculture. Souvent, mes élèves à l’Alpa me disaient qu’ils n’avaient pas besoin d’apprendre la comptabilité, qu’ils feraient appel à un comptable. J’insistais toujours sur la nécessité de comprendre ce que raconte le comptable ».
Dans le même temps, l’élue a conscience, par son expérience avec sa troisième fille, que « tout le monde n’est pas fait pour l’école. Elle s’est installée avec nous après un bac pro Conduite et Gestion de l'Entreprise Hippique et un BTS Acse, et elle continue de se former. Il faut être curieux tout au de sa vie professionnelle, être ouvert et se former ». D’autant que les techniques, les réglementations, les matériels… évoluent. Elle-même a complété son cursus initial par une formation en gestion financière, au début de sa carrière. « J’ai suivi plusieurs formations à la comptabilité pour me mettre régulièrement à jour, des formations en techniques agricoles, sur le salariat, le relationnel, l’écoute… Plus récemment j’ai suivi une formation en communication ».
Quelle que soit la formation, initiale ou continue, Laure Génin insiste sur l’importance d’apporter du concret aux enseignements. « Dans tous les formations que j’ai données, je partageais mon vécu, parfois j’amenais des fiches de comptabilité de l’exploitation pour raccrocher du concret à mes propos ». Elle veille aujourd’hui, au sein des différents conseils d’administration, à ce que « les formations ne s’éloignent pas trop des réalités du terrain. Par exemple, si on veut que les futurs agriculteurs raisonnent correctement les traitements phytosanitaires, il faut continuer de les enseigner ».
Si certains projets n’avancent pas assez à son goût, elle milite pour redonner l’attractivité à certaines formations qui, aujourd’hui ne font pas le plein, « comme le BTS Bioqualim (qualité, alimentation, innovation et maîtrise sanitaire) à Pixérécourt, alors qu’il y a un important besoin en main d’œuvre dans le secteur de l’agroalimentaire ».