L’administration départementale découvre le site du marché aux bestiaux de Laneuveville. L’occasion d’une démarche de lobbying, en faveur de l’approvisionnement de proximité dans les cantines publiques.
La foire aux bœufs de l’APAL se tenait concomitamment à la session de la Chambre d’agriculture du 13 mars. A l’issue de la réunion consulaire, une délégation s’est rendue sur le site de la foire, au «marché aux bestiaux» de Laneuveville-devant-Bayon.
Stéphane Peultier, le président de l’APAL, a saisi cette opportunité pour faire découvrir les lieux aux représentants de l’administration, actuellement mobilisés sur le dossier de la crise agricole. Le sous-préfet de Lunéville, Adrien Gaubert, en charge de la ruralité et de l’agriculture, était entouré de son homologue de Toul, Laurent Naves, du directeur départemental des territoires, Emmanuel Tirtaine et de son adjointe Isabelle Loreaux. Le président du Marché, Jean-Philippe Thomassin, les présidents de la Chambre, Laurent Rouyer et de la FDSEA, Jérémy Jenneson, le directeur de l’abattoir Elivia de Mirecourt, Pascal François et le conseiller régional, Luc Barbier étaient également présents sur place. De même que le président de la communautés de communes du Pays du Saintois, Jérôme Klein et le maire de Laneuveville, Maurice Barbezant.
Favoriser les partenariats locaux
Le site de Laneuveville-devant-Bayon n’est plus à proprement parler un «marché», mais une plateforme d’allotement et de négoce des bestiaux (PLANEBEST). Organisée sous forme de SAS, elle est suivie administrativement par l’APAL. Elle reste une des seules structures de ce type de la filière sur le Grand Est. Et permet notamment de gérer le flux de la production de veaux de la région. «Environ 300 transitent ici chaque lundi», illustre Stéphane Peultier. Des travaux importants de mise aux normes seraient nécessaires, l’Etat et les collectivités sont sollicités.
La délégation a pénétré dans la halle où venait de se tenir la foire et a découvert les animaux qui avaient trouvé preneurs le matin même. Les bouchers traditionnels et la grande distribution s’étaient disputé les meilleures viandes, pour approvisionner leurs rayons avant la fête de Pâques. La génisse croisée de 600 kg Charolais-Parthenaise, appartenant à Alexandre Gérard, éleveur à Aroffe (88) a été placée sous le projecteur. Elle a obtenu le grand prix d’excellence de la ville de Nancy et a été achetée par Julien Leprovost, boucher-charcutier, rue Poincaré, à Nancy.
Dans la «salle des cotations», la discussion à bâtons rompus s’est engagée. Stéphane Peultier a expliqué la création de marques propres par l’APAL «pour favoriser les partenariats locaux» avec de multiples enseignes de la grande distribution. L’association met en œuvre des cahiers des charges en phase avec les attentes sociétales. Tant en matière de bien-être animal que de bilan carbone ou d’autonomie alimentaire. Le contrat tripartite en bœuf signé avec Lidl en 2017 était préfigurateur de l’évolution de la filière. 13.600 animaux ont été abattus dans ce cadre depuis lors. Ce qui a généré une plus-value de 2,2 M€. Stéphane Peultier argumente aussi sur les marques locales, type «Fiers de vous, fiers de nous», «ultra rémunératrice dans le rayon traditionnelle en GMS».
Equilibre matière
L’objectif de cette rencontre était aussi de sensibiliser l’administration à la nécessité d’avancer sur le dossier de l’approvisionnement de proximité, pour la restauration hors domicile (RHD) publique. Une action a été conduite avec le Parc régional naturel de Lorraine (PNRL), lors de la dernière semaine du goût. 15.000 repas ont ainsi été servis dans des écoles de Nancy et de Metz et dans cinq collèges de Meurthe-et-Moselle. «Nous sommes partis sur un équilibre matière, a expliqué Anne Vivier, du PNRL. Les arrières ont été valorisés auprès des bouchers, et les avants, en bourguignons dans les cantines». Pour Laurent Rouyer «demain le travail sera de massifier et de monter en gamme». Pascal François illustre la difficulté «de placer notre viande dans les lycées et les collèges, alors que nous devons respecter EGALIM. On nous reproche le prix, argumente l’abatteur. Alors qu’il y a peu d’écart en réalité. Les gestionnaires ne sont pas sensibilisés à l’argument du territoire». Laurent Naves admet «que le premier critère est toujours le prix, mais il y en a d’autres et il est nécessaire de mieux les répartir ».
Le moins-disant l’emporte
Luc Barbier illustre la difficulté pour le Conseil régional financeur d’imposer une ligne de conduite aux gestionnaires des repas qui ne sont pas placés sous son autorité. Ces décisionnaires disposent toutefois d’une marge de manœuvre, en utilisant des produits sous signes de qualité ou identifiés à un territoire. «Parmi les quatorze lycées dans mon portefeuille, certains jouent le jeu, mais pas tous » déplore l’élu. Pascal François cite un exemple précis d’une offre de viande HVE compatible EGALIM, permettant un retour direct aux éleveurs de 15 à 20 centimes du kilo… C’est le concurrent moins disant qui a emporté le marché…
«L’écart de prix peu important constitue un vrai sujet» synthétise Adrien Gaubert, qui se dit favorable à renforcer les contrôles. «Nous avons la capacité d’accompagner les décisions des personnes en responsabilité, qui dépendent ou pas de nous» assure le sous-préfet. Confirmant ainsi les initiatives engagées par Françoise Souliman, le préfet de Meurthe-et-Moselle, depuis quelques semaines.