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AG des anciens exploitants : Raphaël Pitti, la médecine humanitaire vécue en Syrie

De g. à d. : Raphaël Pitti (médecin urgentiste), François Thomas (pdt Sdae), Luc Barbier (pdt Fdsea) et Antoine Clavel (pdt Ja).Photo : S.Roussel
De g. à d. : Raphaël Pitti (médecin urgentiste), François Thomas (pdt Sdae), Luc Barbier (pdt Fdsea) et Antoine Clavel (pdt Ja).Photo : S.Roussel

De retour de Syrie, invité de l'assemblée générale de la section départementale des anciens exploitants qui s'est tenue le 17 novembre, Raphaël Pitti, ancien militaire, est anesthésiste réanimateur spécialisé dans la médecine de guerre, a livré un témoignage poignant sur la situation de la population locale.

En 2011, la répression des manifestations du printemps arabe provoque le déclenchement de la guerre civile syrienne. Une partie des soldats déserte et forme l’armée syrienne libre, soutenue par les occidentaux qui croyaient que la guerre ne durerait pas. Dix ans après, la guerre civile persiste.

Au début du conflit, les blessés étaient ramenés dans les hôpitaux pour être soignés. Mais dans les heures qui suivaient, police et armée venaient récupérer les hommes, les tuaient sur place ou les emmenaient pour les torturer. Les soignants syriens ont alors commencé à mettre en place des postes de secours clandestins, puis des hôpitaux, avec des postes chirurgicaux et de réanimation dans des appartements.

Soigner sans discrimination

L’engagement de Raphaël Pitti date de 2012. Alors responsable du service de réanimation de la polyclinique Gentilly à Nancy, il entend un témoignage qui le touche, au volant de sa voiture. Un médecin franco-syrien témoigne sur les bombardements d’hôpitaux en Syrie, les arrestations et les tortures de soignants… Il en a été bouleversé : « le serment d’Hippocrate demande de soigner sans discrimination. C’est éthiquement insupportable de tuer un soignant qui soigne ». De là est né son engagement et son premier voyage en Syrie.

Entré clandestinement la première fois dans le pays, il a rapidement trouvé quelle aide il pouvait apporter à ces soignants. Les syriens ignoraient comment trier les malades, la protocolisation des traitements, la pratique du « damage contrôl » (contrôle de la blessure avant de la réparer ultérieurement), comment calmer la douleur… Former lui est apparu comme une évidence. Il a alors organisé des formations de soignants, en France puis en Syrie. « Mes collègues syriens ont écrit une page de l’histoire de la médecine » constate-t-il. La situation a été telle qu’à un moment donné, plus personne ne rentrait en Syrie, pas même les humanitaires. Les hospitalisations étaient devenues impossibles car trop dangereuses. Tout se passait dans les caves, dans d’anciennes mines.

Sept millions de Syriens ont quitté leur pays : quatre ont rejoint la Turquie, les autres le Liban et la Jordanie. La population n’a aucun avenir dans ce pays. En Turquie, les Syriens vivent dans la précarité. Ils sont arabes alors que les Turques parlent Turc.

Famine redoutée 

Le Frontex, police des frontières européenne, va voir son budget passer de 300.000 à 1.2 milliard d’euros dans les cinq prochaines années. « On veut mettre l’Europe dans un bunker, mais on ne pourra pas les empêcher de passer. La solution est forcément de partager et d’aider les pays sur place. Sans compter qu’il faudra compter avec les réfugiés climatiques qui commencent à émigrer, détaille Raphaël Pitti. Après onze ans de conflits, la situation est moins violente en Syrie. Le régime a récupéré 60 % du territoire. Il y a un effondrement du système sanitaire, économique et éducatif. L’inflation est aussi importante qu’au Liban. On craint actuellement une famine.