Le Président de la République, Emmanuel Macron et le Premier ministre, Michel Barnier, se sont mis d’accord sur une liste de 38 noms pour constituer le gouvernement dont la liste a été dévoilée le 21 septembre. Le chef de l’Etat a nommé Annie Genevard à l’Agriculture. Elle est attendue de pied ferme par les syndicats agricoles.
C’est plutôt une spécialiste des questions éducatives et culturelles qui prend la tête de l’Hôtel de Villeroy, le siège du ministère de l’Agriculture, de la Souveraineté alimentaire et de la Forêt. (lire 1er encadré). Reprenant le maroquin de Marc Fesneau, Annie Genevard va devoir s’atteler à un vaste chantier en perpétuel mouvement et renouvellement. Les différentes crises que le secteur agricole et agroalimentaire a connues depuis quelques années ont laissé des traces profondes : Covid, inflation, hausse des coûts de production, crise de l’agriculture biologique, pertes de parts de marchés à l’exportation, décapitalisation dans l’élevage, accords de libre échange (dont le Mercosur), pertes de capacités de production (phytos…). C’est ce qui avaient conduit les agriculteurs à manifester tout l’automne 2023 et pendant l’hiver 2024 (janvier-février).
La nouvelle ministre devra aussi donner les moyens aux agriculteurs de passer le cap de la transition agroécologique alors même que leurs revenus devraient baisser cette année en raison des nombreuses calamités qui semblent n’avoir épargné que peu de secteurs. La récolte de blé tendre accuse une chute de 25,6 %, les vendanges un recul de 18 %, les troupeaux sont touchés par de nombreuses épizooties : FCO-3, FCO-4, FCO-8, MHE, tuberculose…
Compétitivité, simplification…
Réagissant à la nomination d’Annie Genevard, les deux syndicats majoritaires, FNSEA et Jeunes agriculteurs, ont demandé au Gouvernement Barnier de « faire de l’agriculture une priorité pour apaiser la colère et l’incompréhension grandissantes des agriculteurs, déçus par les engagements non tenus après les mobilisations de l’hiver dernier ». En plus de mesures financières d’urgences, ils demandent de remettre à l’ordre du jour du Parlement le projet de loi d’orientation agricole, amendé par la Loi Entreprendre en agriculture qu’ils ont présentée fin août. Leurs attentes sont aussi importantes sur les dossiers du « renouvellement des générations, de la compétitivité, de la simplification, des moyens de production, ainsi que des suites d’Egalim », indique le communiqué commun des deux organisations syndicales du 21 septembre. Les deux président, Arnaud Rousseau (FNSEA) et Pierrick Horel (JA) ont félicité la nouvelle ministre pour sa nomination et salué l’action de « Marc Fesneau » à l’égard duquel les deux syndicats « ont toujours été exigeants ».
Si l’ancien ministre va retrouver les bancs de l’Assemblée, l’ancienne ministre déléguée à l’Agriculture, Agnès Pannier-Runacher, a pris du galon et devient ministre de la Transition écologique, en lieu et place de Christophe Béchu. A noter également la nomination de la sénatrice Françoise Gatel au poste secrétaire d’Etat chargée de la ruralité, du commerce et de l'artisanat, auprès de Catherine Vautrin, ministre du Partenariat avec les territoires.
Un premier rendez-vous devrait être fixé assez rapidement entre Annie Genevard et les syndicats agricoles.
Bio express d'Annie Genevard Originaire du Doubs, Annie Genevard est la troisième femme à devenir ministre de l’Agriculture sous la Ve République et depuis la création du ministère, après Edith Cresson (1981-1983) et Christine Lagarde (mai 2007-juin 2007). L’actuelle secrétaire générale des Républicains a enseigné les lettres classiques au lycée Edgar-Faure à Morteau, après avoir obtenu son Capes. Engagée en politique, au RPR en 1996, elle est élue maire de Morteau en 2002 et reste à cette fonction jusqu’en 2017, date à laquelle elle doit céder son siège pour conserver celui de députée, en raison de la loi sur le non cumul des mandats. Elue au Palais Bourbon depuis 2012 sans discontinuer, elle a été première vice-présidente de l’Assemblée nationale (2017-2022) et élue 6e vice-présidente lors de la dernière législature. Devenue ministre, l’actuelle membre du comité directeur de l’Association nationale des élus de la montagne (ANEM) est remplacée dans l’hémicycle par son suppléant Eric Liégeon, qui est éleveur laitier. |
L’agriculture une priorité pour le gouvernement Barnier ? Faut-il accorder de l’importance à l’ordre protocolaire au sein du Gouvernement ? En règle générale, non, puisque l'ordre protocolaire n'a pas d'utilité autre que symbolique ou honorifique. Il n’engage en rien sur la priorité donnée à tel ou tel dossier. Le fait que le ministre de la Justice et Garde des Sceaux vienne juste après le Premier ministre ne veut pas dire qu’il sauvera son budget à Bercy, qui, quelle que soit sa place, reste le poste clé. De même, alors qu’il était 15e dans l’ordre des ministres dans le gouvernement de Jean Castex, Julien Denormandie (très apprécié du monde agricole), a-t-il toujours eu l’oreille du Président Macron. Cependant, doit-on interpréter comme une rétrogradation le fait que le ministère de l’Agriculture glisse de la 5e place (Marc Fesneau) à la 13e (Annie Genevard) ? Les agriculteurs jugeront plus sur pièce et dans leurs cours de ferme qu’à l’aune d’une annonce déclamée au sein d’un salon élyséen. |