Chauffer des maisons du village. Une belle intention qui prend encore plus de sens aujourd’hui, avec la crise énergétique. Le projet a commencé à germer dans la tête de Johann Colet dès 2010. Mais les aléas de la vie ont mis les réflexions en stand-by quelques années. L’unité a finalement été mise en route fin 2020.
Vého, petit village d’une centaine âmes, au sud de la Meurthe-et-Moselle. Johann Colet y exploite 300 ha, élève un troupeau laitier et engraisse des taurillons, quelques 500 bovins au total. Dès 2010, il s’intéresse à la méthanisation, « comme voie de diversification, et aussi parce qu’'il y avait la mise aux normes à réaliser », confie l’éleveur. Mais les aléas de la vie – le Gaec auquel il appartenait s’est séparé - ont mis un temps en veille le projet.
En 2018, il réenclenche les réflexions sur la méthanisation. La nécessité de construire une nouvelle fosse est toujours présente. La question de monter un projet collectif se pose à lui. Après quelques discussions avec les agriculteurs voisins, il a finalement choisi l’investissement individuel, « pour plus de facilité quand il y a une décision à prendre ». Il se rapproche de la Chambre d’agriculture de Meurthe-et-Moselle pour réaliser une étude de faisabilité. « Je voulais valoriser la chaleur, au moins pour nos maisons, et pourquoi pas pour des maisons du village », confie l’éleveur. Une réunion publique est alors organisée pour informer les habitants du village sur les possibilités de les raccorder au réseau de chaleur. « L’annonce du projet de méthanisation a globalement été bien perçu. C’est un village où il y a plutôt une bonne entente entre les habitants », estime Johann Colet.
Quinze habitations chauffées
Le choix se porte sur une unité d’une puissance de 420 kWe, qui absorbe environ 50 t d’intrants par jour soit 17.000 t par an dont 75 % d’effluents d’élevage, 5 % de cultures à vocation énergétique et 5 % de maïs, « plus quelques intrants extérieurs, notamment de la poussière de chanvre et du soluble de céréales ». S’il n’a pas souhaité s’engager dans un projet collectif, il a toutefois noué un partenariat avec quatre autres agriculteurs du secteur qui lui fournissent des effluents d’élevage en échange de digestat.
Le projet prévoit de chauffer une quinzaine de maisons. « L’unité aurait la capacité de fournir la chaleur à une vingtaine d’habitations, mais j’ai préféré jouer la prudence dans un premier temps pouvoir assurer le service correctement », explique Johann Collet.
Les premiers coups de pelle ont été donné en 2019. Des fouilles archéologiques ont retardé un temps le chantier…. ainsi que l’arrivée de la crise sanitaire et le premier confinement. L’unité a finalement été mise en route à la fin de l’année 2020.
Un séchoir pour la période estivale
Pour relier les quinze maisons, Johann Colet a dû déployer deux tuyaux : un pour le haut et un pour le milieu du village. Le réseau de chaleur s’étend sur 1,5 km. L’agriculteur a financé l’intégralité du réseau de chaleur jusqu’à l’armoire et les échangeurs de chaleur permettant de fournir à la fois le chauffage et l’eau chaude sanitaire, soit 400.000 euros au total. « Les particuliers ont eu à prendre en charge le raccordement depuis l’armoire jusqu’à leur maison. C’est un vrai plus pour eux, ils n’ont plus d’appareil à entretenir dans leur maison ». Autre avantage, non négligeable : le coût moindre de l’énergie. « J’ai signé un contrat sur huit ans avec chaque foyer : l’abonnement est de 360 euros par an et le prix est de 0.048 euros le kwh. Sachant que la consommation d’un foyer moyen de quatre personnes est de 20.000 kwh, la facture s’élève à 960 euros par an, soit, au total, 1.460 euros par foyer par an », explique Johann Colet.
Et parce qu’en été, les habitations consomment très peu de chaleur, Johann Colet a ajouté un séchoir dans son projet, qui lui permet de sécher des fourrages, du maïs et du tournesol pour les exploitants du secteur.