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Jean-Marie Schléret : « Ajouter de la vie aux années »

L’omniprésence du numérique dans la vie quotidienne ne signifie pas forcément rompre l’isolement. Photo : JL.Masson
L’omniprésence du numérique dans la vie quotidienne ne signifie pas forcément rompre l’isolement. Photo : JL.Masson

Une fois l’an, les anciens collaborateurs des OPA 54 et 88 se retrouvent pour partager leurs préoccupations, complémentaire santé et montant des pensions, pour l’essentiel. En parfait connaisseur de la question des personnes âgées, Jean-Marie Schléret, l'invité d'INITIATIV’RETRAITE 54-88, a livré sa réflexion sur le « bien vieillir ». Avec deux mots clés : un environnement favorable et en bonne santé.

L’assemblée d’ INITIATIV’RETRAITE 54-88 a permis à l’ancien  président du CDCA 54, Jean-Marie Schléret, d’intervenir sur le thème du « bien vieillir ». Celui qui présida la fédération des parents d’élèves de l’enseignement public dans les années 80, puis le Conseil national consultatif des personnes handicapées entre 2002 et 2009, introduit son sujet  sur le ton de l’humour « prendre sa retraite, ce n’est pas l’autorisation de rouiller ».

« La qualité de cœur »

L’ancien député de Meurthe-et-Moselle, qu’il fut entre 1993 et 1995, veut sortir du concept de la retraite en un seul bloc. Les modes de vie ont changé. Pour certains, la période de la retraite débute à 55 ans et se prolonge au-delà de 100 ans. En famille, cinq générations se côtoient, parfois. La notion de séniors apparaît avec la soixantaine. « Beaucoup de retraités refusent le statut de consommateur, observe Jean-Marie Schléret. Ils veulent consacrer leur énergie au quartier ou à l’association, dans le but de transmettre leur expérience. C’est la qualité de cœur ».

Pour la personne qui atteint l’âge de 85 ans, il est important de demeurer en relation dans un engagement collectif, poursuit le conférencier. L’omniprésence du numérique dans la vie quotidienne ne signifie pas forcément rompre l’isolement. « Il faut privilégier le contact humain et se méfier des belles formules comme le guichet unique… derrière l’hygiaphone, une barrière se dresse avec la personne reçue. Certes il faut savoir garder la bonne distance, mais je préconise la bonne proximité ».

L’arrivée en EHPAD donne l’impression d’être placé à la périphérie de la vie sociale. Et ces établissements sont confrontés à la difficulté de recruter et à l’insuffisance de moyens, tout en pratiquant des tarifs élevés. « Notre mode d’accueil doit être repensé. 40 % des personnes en perte d’autonomie sont en EHPAD, elles seront 60 % en 2050. Qui va payer ? ». Jean-Marie Schléret remarque que cette proportion n’est que de 12 % au Canada. En Italie, le modèle familial traditionnel favorise le maintien à domicile. En Finlande, en Suède et au Danemark, ce maintien est beaucoup plus encouragé. En Allemagne, huit personnes sur dix restent à la maison. « Ces pays indexent le coût de ces services avec le montant des retraites. En France, ce n’est pas la priorité de l’Etat ».

« Avoir un chez soi » ça compte

Jean-Marie Schléret considère toutefois « que les EHPAD n’ont pas démérité, en particulier en matière de traitement de la maladie d’Alzheimer. Mais le réflexe naturel des pays et mamys est de résister des quatre fers, même si toute la famille s’y met. Il existe certainement des formules plus adaptées comme la résidence autonomie, dans le cadre de laquelle l’aîné continuera à se rendre au marché, de cuisiner, de collecter ses œufs au poulailler et de jardiner ». « Ajouter de la vie aux années, et non pas des années à  la vie » serait un peu la maxime cultivée par ce fin connaisseur de la question des personnes âgées qui rebondit sur un sujet d’actualité : le maintien de l’animal de compagnie. « Un vrai sujet qui ne demande pas tant d’aménagement que ça. A défaut : un véritable crève-cœur pour la personne âgée ».

A la lumière de cas d’établissements qu’il a eu à gérer, dans le cadre de ses fonctions à la mairie de Nancy, Jean-Marie Schléret met en garde. L’aménagement d’une nouvelle construction au confort maximal peut parfois se heurter à la diminution de la chaleur humaine en vigueur dans les anciens locaux… Si le maintien à domicile ne constitue pas forcément la meilleure solution, « avoir un chez soi » ça compte, à condition de bénéficier de plus de présence humaine. Et l’ancien élu regrette que la loi Grand Âge soit « en panne… Le cinquième risque est réduit à sa plus simple expression ». Jean-Marie Schléret conclut en prônant une évolution du statut et de la place des accompagnants, en favorisant des lieux de répit pour les aidants. « Beaucoup de bénévoles ont, eux aussi, besoin de soutien ».

 

Jean-Marie Schléret : « Il faut privilégier le contact humain et se méfier des belles formules comme le guichet unique ».  Photo : JL.Masson
Jean-Marie Schléret : « Il faut privilégier le contact humain et se méfier des belles formules comme le guichet unique ». Photo : JL.Masson